Montparnasse, ce nom sonne comme une promesse de créativité, de vie délurée.Dans cette balade, on part en quête de l’essence artistique de Montparnasse, à la rencontre de Picasso, Giacometti, Man Ray ou Modigliani…
Suivez le guide, à la recherche des traces créatives et bien vivantes du Montparnasse des « Montparnos ».
© B Fougeirol ADAGP Musée Zadkine
Démarrons cette promenade dans le Montparnasse des artistes tout en douceur avec la découverte d’un trésor caché, le Musée Zadkine. Entrez, poussez les grilles de cette jolie maison du 18ème siècle, vous voilà dans la résidence d’Ossip Zadkine, sculpteur d’origine russe, figure essentielle de l’Ecole de Paris, proche de Picasso, Modigliani ou Brancusi et élément-clé du Montparnasse vibrionnant des artistes.
On parie que vous allez tomber amoureux de cette adorable maison (une ancienne dépendance du couvent Notre-Dame de Sion) qu’il habita dès 1910 avec son épouse Valentine Prax. Vous aimerez peut-être même encore plus son jardin caché, inespéré, peuplé de statues dont l’artiste aurait lui-même choisi l’emplacement.
Notez que l’accès aux collections permanentes (et au jardin) est gratuit.
Musée Zadkine - 100, rue d’Assas, Paris 6e
Tous les jours de 10h à 18h sauf le lundi.
© Studio TTG
Aaaah, La Closerie des Lilas… posée sur le carrefour de Port Royal, cette brasserie mythique résonne encore des danses et des débats qui l’agitèrent dès sa création, en 1847.
Modigliani, André Breton, Aragon, Picasso, Jean-Paul Sartre, André Gide, Paul Eluard, Oscar Wilde, Samuel Beckett et Man Ray figurent parmi les artistes et les écrivains qui ont foulé le splendide sol en mosaïque de la Closerie. Aujourd’hui encore, on peut y croiser de nombreux artistes et écrivains, et l’on y remet chaque année le Prix de la Closerie des Lilas, qui récompense un livre écrit par une femme. C’est dire si l’art résonne entre ces murs au style Art Déco !
Le saviez-vous ? c’est à la Closerie des Lilas qu’une dispute entre Tristan Tzara et André Breton a littéralement mis fin au dadaïsme, donnant naissance du même coup au mouvement surréaliste.
La Closerie des Lilas - 171 boulevard du Montparnasse, Paris 6e
© Studio TTG
Bienvenue rue Campagne-Première, bienvenue dans LA rue du Montparnasse des Montparnos. C’est bien simple, tous les plus grands semblent avoir décidé de poser un jour leurs pinceaux ou leur plume dans l’un des ateliers de cette rue mythique. On vous emmène ?
N°3 / Aujourd’hui c’est un immeuble contemporain sans grand intérêt…mais au début du 20ème siècle, le sculpteur François Pompon et le peintre Amedeo Modigliani y vécurent dans des « ateliers-logements ».
N°5 / Le couple d’écrivains-poètes Louis Aragon et Elsa Triolet y vécurent dans un atelier, de 1929 à 1935
N°9 / C’est l’ancienne « Cité des artistes ». Un véritable petit village au cœur de la rue Campagne-Première et 128 ateliers construits à partir de matériaux provenant des bâtiments de l’Exposition universelle de 1889. La Cité des artistes abrita la créativité de grands noms parmi lesquels les peintres Léonard Foujita (jusqu’en 1917), Giorgio de Chirico, Amedeo Modigliani, Vassili Kandinsky, Max Ernst, Joan Miró, Alberto Giacometti ou encore l’écrivain Reiner Maria Rilke.
Aujourd’hui de nombreux artistes habitent encore derrière la porte cochère du 9 rue Campagne-Première. Mais, sauf heureux hasard ou événement culturel (surveillez le site Les ateliers du 9), la Cité des artistes reste invisible derrière son digicode
N°14 / Vous êtes devant le domicile du peintre Yves Klein, qui habita et travailla dans cet immeuble de 1958 à 1962. C’est d’ailleurs dans cet appartement qu’il créa le mouvement « Nouveau Réalisme » avec le critique d’art Pierre Restany.
N°17bis / Le photographe Eugène Atget y avait son appartement. C’est ici qu’est née sa carrière photographique : en effet, Atget, sans le sou, était en quête d’une source de revenus. Réalisant que les peintres de son voisinage manquaient de documents photographiques pour nourrir leur inspiration, il se décida à les leur fournir ! Et c’est ainsi qu’Eugène Atget va inlassablement photographier Paris et ses environs, des années durant, vendant son travail à la Cité des artistes, quelques numéros plus haut. Ses clients ? Foujita, Derain, Utrillo, entre autres…
N°23 / A partir de1917, le peintre Léonard Foujita y installe son atelier.
N°29 / Il existe toujours, l’hôtel Istria, avec sa jolie marquise. Mais il est bien plus chic qu’au début du 20ème siècle, quand les artistes sans le sou y louaient des chambres au mois. Sur sa guest-list ? Rainer Maria Rilke (croisé au n°9), Marcel Duchamp, Francis Picabia, Kiki de Montparnasse, Tristan Tzara, Éric Satie, Elsa Triolet (avant sa rencontre avec Louis Aragon) ou Man Ray y séjournèrent. Et vous, pour, peut-être, retrouver l’esprit des Montparnos ?
N°31 et 31bis / C’est la star de la rue, cet immeuble. C’est vrai qu’il est splendide, le 31 rue Campagne Première, sans doute le plus bel immeuble d’ateliers jamais construit à Paris, avec sa structure en béton armé et sa succession de verrières d’ateliers bâtis en duplex. L’immeuble, construit en 1911, a d’ailleurs été primé au concours de façade de la Ville de Paris, la même année. L’immeuble offre 4 étages d’ateliers en duplex : les sculpteurs au rez-de-chaussée, les peintres au-dessus – même si, exposé plein ouest, le 31 n’a jamais offert la lumière optimale dont ils auraient eu besoin (celle du nord, constante et douce).Immeuble cossu, bourgeois même, le 31 accueillit surtout des artistes « à succès ». Man Ray et Kiki de Montparnasse purent s’y offrir un atelier, tout comme Aragon et Elsa Triolet.
Chaïm Soutine aussi y loua un atelier, Pierre Restany et Jean-Pierre Raynaud y habitèrent.
Pour profiter pleinement de la somptuosité du 31, faites un petit crochet par le Passage d’enfer (vous y accédez par le 247 boulevard Raspail, poussez la grille, elle est ouverte) : en plus de vous émerveiller devant les persiennes pastel de cette ancienne cité ouvrière, vous découvrirez l’arrière du 31 : de jolies céramiques à même le ciment et des maisons de ville. Un rêve.
Le saviez-vous ? C’est au bout de la rue Campagne Première que s’écroule et meurt Michel Poiccard (incarné par Jean-Paul Belmondo), le héros d’A bout de souffle, le film culte de Jean-Claude Godard.
Rue Campagne-Première, Paris 14e
© Studio TTG
En route vers l’Institut Giacometti, jetez un œil au 242 boulevard Raspail : cet opulent hôtel particulier, avec ses grandes verrières, fut l’un des ateliers de Pablo Picasso (après quelques années au n°11 de ce même boulevard).
Ancien atelier de Pablo Picasso - 242 boulevard Raspail, Paris 14e
© Xavier Bejot
Vous voilà devant le 5 bis rue Victor Schoelcher, un hôtel particulier cossu et flamboyant. Vous voilà devant l’Institut Giacometti mais pas devant « chez » Alberto Giacometti, car l’artiste aura passé sa vie dans un grand dénuement. Mais c’est dans cette belle maison que la Fondation Giacometti a choisi de reconstituer l’atelier d’Alberto. Des expositions temporaires permettent également de revisiter l’œuvre de Giacometti et sa résonance avec l’époque ou d’autres œuvres.
L'Institut Giacometti est accessible via sa billetterie en ligne et paiement sur place, uniquement par carte bleue.
Le saviez-vous ? A 15 minutes de l’Institut, poussez vers Alésia jusqu’au 46 rue Hippolyte-Maindron, c’est là que se situait l’atelier (modeste) qu’Alberto Giacometti partageait avec son frère Diego, de 1926 jusqu’à sa mort en 1966.
Institut Giacometti - 5 bis rue Victor Schoelcher, Paris 14e
© OTCP Daniel Thierry
Ils ont vécu dans le quartier, certains y reposent à jamais, d’autres ont signé des œuvres sur des sépultures amies : partons à la rencontre des Montparnos dans le cimetière du Montparnasse.
Ils y sont enterrés : Auguste Bartholdi, Paul Belmondo, Constantin Brancusi, Brassaï, César, Henri Fantin-Latour, Balthazar Lobo,Serge Gainsbourg, Willy Mucha, Jean-Paul Sartre & Simone de Beauvoir, Chaïm Soutine, Roland Topor, Zao Wou-Ki…
Des tombes remarquables :
Niki de Saint Phalle a signé deux sculptures : « le chat de Ricardo » et l’oiseau », tombe de Robert Thibier- la sépulture du sculpteur César est surmontée d’un centaure créé par l’artisteUne visite pour tout savoir !
Mais le meilleur moyen de découvrir les locataires remarquables de ce cimetière magnifique, le 2ème plus grand de Paris après le Père-Lachaise, c’est encore de réserver une visite avec Explore Paris ! Deux heures d’enquête et de découvertes vous attendent.
Cimetière du Montparnasse - 3 boulevard Edgar Quinet, Paris 14e
© Studio TTG
N°5 / Le peintre Léonard Foujita vécut et travailla dans cet immeuble.
N° 9 / Bâti en 1926, cet immeuble a abrité un hôtel proposant des studios d’artistes à louer. Ernest Hemingway, Francis Scott Fitzgerald ou la danseuse Isadora Duncan y ont séjourné.
Rue Delambre, Paris 14e
© OTCP
Si le Montparnasse des Montparnos a disparu, son esprit se réincarne chaque dimanche au Marché de la création du boulevard Edgar Quinet.
Peintres, graveurs, sculpteurs, photographes, céramistes, etc : les artistes d’aujourd’hui proposent leurs œuvres au public. Il y a de tout, pour tous les goûts et c’est l’occasion de jolies discussions. Alors n’hésitez pas à aller à leur rencontre !
Marché de la Création - 56 boulevard Edgar Quinet, Paris 14e
Le temps d'une pause
Un petit creux ? Envie de goûter l’esprit des Montparnos ? Autour du Carrefour Vavin qu’ils aimaient tant (officiellement baptisé Place Pablo-Picasso), l’offre de restaurants et cafés est si généreuse que vous devriez sans peine trouver votre bonheur !
Entre les grandes brasseries historiques (La Coupole, Le Select, Le Dôme et La Rotonde) et les délicieuses crêperies de la rue du Montparnasse toute proche (la rue des Bretons !), notre cœur balance.
Et si c’est juste d’un banc au calme dont vous rêvez, savourez une pause parnassienne à l’ombre de l’église Notre-Dame des Champs, dans le square Ozanam.
Carrefour Vavin / Place Pablo-Picasso, Paris 6e
Rue du Montparnasse, Paris 14e
Square Ozanam - 18 rue Stanislas, Paris 6e
Elles se toisent, toutes les quatre. Elles sont disposées tout autour du carrefour Vavin et disent l’histoire joyeuse et artistique du quartier. Elles, ce sont les 4 grandes brasseries légendaires de Montparnasse : le Select, la Coupole, le Dôme et la Rotonde.
Vous pouvez bien sûr les admirer depuis le boulevard – vous aimerez sans doute la décoration presque rococo du Dôme… quant au néon « Le Select », on vous garantit qu’il est très instagrammable !
© Groupe Bertrand
Les mosaïques y sont classées, les colonnes aussi d’ailleurs. Avec 400 places assises, La Coupole a longtemps été le plus grand restaurant de Paris. La célèbre brasserie – dont la devanture a été refaite – a accueilli plus de clients célèbres qu’on ne pourrait lister. Mais sachez que l’humoriste Coluche y a rencontré Véronique, sa future femme. Qu’Alberto Giacometti y dessinait toute la nuit sur les nappes en papier – qu’il emportait toujours avec lui au petit matin, et que Josephine Baker aimait y venir avec Chiquita, son guépard apprivoisé.
Le saviez-vous ? Si vous comptez vous y restaurer, commandez un curry d'agneau, c'est le plat-signature (qui vous sera peut-être servi par un Indien en costume traditionnel, folklore éternel de La Coupole, longtemps stoppé, récemment relancé).
La Coupole - 102 boulevard du Montparnasse, Paris 14e
Studio TTG
Décidément, La Rotonde plaît aux futurs Présidents de la République français. François Hollande y avait célébré sa victoire à la primaire du Parti socialiste en 2011. Emmanuel Macron y a fêté sa qualification au second tour de la Présidentielle de 2017.
Le saviez-vous ? Jusqu’en 1959, la salle de cinéma et le restaurant mitoyens faisaient partie de La Rotonde.
La Rotonde Montparnasse - 105 boulevard du Montparnasse, Paris 14e
Repaire des artistes « Montparnos » au même titre que ses voisines et concurrentes, Le Select fut le premier café de Paris à rester ouvert toute la nuit ! Et pour la dose de glamour contemporain, sachez que l’actrice américaine Scarlett Johansson est accro au fameux « poulet rôti du Select » !
Le saviez-vous ? Le Select et son joli néon ont aussi servi de port d’attache sécurisant aux figures homosexuelles du milieu artistique (dont l’acteur Jean Marais) sous l’Occupation nazi, pendant la Seconde guerre mondiale.
Le Select - 99 boulevard du Montparnasse, Paris 14e
Le Dôme fut le premier café de Montparnasse mais surtout le point de convergence de la « colonie littéraire anglo-américaine » de Paris au début du 20ème siècle.
Le saviez-vous ? Les célèbres habitués artistes du Dôme se faisaient appeler « les dômiers ». Parmi eux rien moins que Robert Capa, Henri Cartier-Bresson, Vassily Kandinsky, Ernest Hemingway, Paul Gauguin, Max Ernst, Anaïs Nin, Amedeo Modigliani, Man Ray ou Pablo Picasso (liste absolument non exhaustive).
Le Dôme - 108 boulevard du Montparnasse, Paris 14e
© Studio TTG
Cité d’artistes dissimulée derrière la gare Montparnasse, la Villa Vassilieff porte le nom de l’artiste qui l’anima, dans les années 1910.En 1911, la peintre et sculptrice russe Marie Vassilieff, ancienne élève du peintre Henri Matisse, installe son atelier & académie au fond de cette petite impasse pavée et végétalisée.
Un atelier qu’elle transforme volontiers en cantine pour artistes sans le sou, dès les années 1920, soutenant et accueillant les (futurs) grands noms de l’avant-garde : Picasso, Modigliani, Soutine, Léger ou Chagall.
Puis le lieu tombe un peu dans l’oubli, devient un musée mais sans succès… avant de renaître de ses cendres.
Allez à la Villa Vassilieff : vous y trouverez une résidence d’artistes, un lieu d’exposition d’art contemporain, un café et surtout un petit bout réanimé de l’esprit avant-gardiste qui anima si longtemps ce quartier de Montparnasse !
Villa Vassilieff - 21 avenue du Maine, Paris 15e
© Benoit Fougeirol
Entrez dans le bâtiment spectaculaire où le sculpteur Antoine Bourdelle vivait et pratiquait son art. Découvrez son atelier de bois du 19ème siècle et cette extension contemporaine qui lui a été adjointe, signée par l’immense architecte Christian de Portzampac.
Arpentez les galeries en briques de Montauban le long d’un péristyle qui encercle un jardin parsemé de sculptures.
Le musée Bourdelle est un lieu d’art et de vie, mais aussi presque un lieu de recueillement, de calme, dans ce jardin en bordure d’un Montparnasse si agité, hier comme aujourd’hui.
Finissez-y votre balade, en plus l’accès aux collections permanentes du musée est gratuit !
Musée Bourdelle - 18 rue Antoine Bourdelle, Paris 15e